Breton et ses amis qui ont manié l’écriture automatique ont pensé à ce jeu qui a donné naissance à des phrases tout ce qu’il y a de plus original et drôle certaines fois. Puis il s’est avéré que cela peut être adopté comme un style d’écriture, bien proche de l’écriture automatique avec tout ce que cela a d’improvisé et d’inattendu. En fait, il s’agit bien d’un jeu, un simple divertissement en quelque sorte qui a pris davantage d’importance par la suite et est devenu partie intégrante de l’écriture surréaliste puisqu’il se base sur un mécanisme automatique et se rapproche de l’écriture automatique elle-même. Le principe du jeu est très simple : l’un des joueurs écrit un mot et plie le papier de sorte que le joueur suivant ne saura pas ce qui aura été écrit avant lui et choisira un mot au hasard et ainsi de suite, de sorte que le texte obtenu est très inattendu, parfois drôle ou grinçant. Ce même jeu peut se faire grâce à des dessins dont chacun dessine une partie et à la fin du jeu, on peut se trouver avec une image, tout ce qu’il y a de plus saugrenu.
Ce jeu est donc une manière d’accéder davantage au monde imaginaire, étant donné que le courant surréaliste est persuadé qu’on a intérêt à explorer autant que possible ce monde d’apparence inaccessible, mais riche par tout ce qui demeure caché dans l’inconscient et qui ressort spontanément alors que l’on ne s’y attend pas pour peu qu’on le provoque d’une manière ou d’une autre par un type de jeu tel que “le cadavre exquis” par exemple où on laisse libre cours à son imagination pour écrire le premier mot qui vient à l’esprit sans réfléchir au préalable à l’effet que produira la fin puisque l’on ne sait ni ce qui a précédé ni ce qui suivra. Le projet réel de ce jeu ou plutôt de cette expérience en tant que telle est d’adopter une certaine liberté pour s’exprimer sans user de contraintes de n’importe quel ordre qui soit. Ainsi, tout semble se rejoindre dans l’expression surréaliste adoptée par Breton et ses amis : cela va du hasard objectif, vers la rencontre fortuite, le rêve prémonitoire ou la folie dans sa démesure, le tout pour décloisonner l’esprit et lui fournir tout l’espace dont il a besoin pour s’éclater au vrai sens du terme et produire le mot magique ou l’image troublante.