Breton était étudiant en médecine et cela aura un impact certain surtout en ce qui concerne son orientation littéraire et la création dans le domaine de la littérature en général. En fait, Breton demandera lui-même son affectation au centre neuropsychiatrique de Saint-Dizier et y fera un séjour de juillet à novembre 1916. On était en pleine guerre et les évacués du front qui souffraient de troubles mentaux étaient envoyés en ce centre. Ainsi, Breton a été mis en contact avec ces personnes et a pu suivre de très près leurs comportements et essayer de comprendre les désordres de l’esprit et de parvenir à une meilleure compréhension de soi-même et de s’entrevoir la création poétique sous un nouvel angle.
La folie, tel qu’on définit certains désordres dans le comportement, est alors vue avec d’autres yeux par Breton. C’est pour cela qu’en cet été de ses vingt ans, Breton était plutôt désorienté dans ce choix d’extrême importance pour lui : opter carrément pour une carrière de médecin en psychiatrie ou s’adonner à la poésie tel qu’il l’a toujours souhaité. Rien d’étonnant donc que même en ayant finalement privilégié la littérature à l’atmosphère des asiles psychiatriques, le monde de ces êtres souffrant de troubles de comportement a continué à le fasciner, et d’une certaine façon, le mot “folie” n’a pas de signification palpable pour lui, il n’ y voit rien d’autre qu’une manière différente d’entrevoir ce qui nous entoure et tente même de lui trouver des interprétations convaincantes.
D’ailleurs, on peut rappeler son expérience avec Nadja qui a fait l’objet d’un livre et demeure un exemple dans la manière d’explorer un esprit qui semble “raisonner” autrement mais qui n’est surtout pas dénué d’intérêt. La folie est vue autrement qu’un état pathologique à soigner en un centre spécialisé mais plutôt telle qu’une manière de créer différemment peut-être mais ayant sa propre valeur et un intérêt certain dans la manière d’explorer l’esprit et de comprendre l’homme en général. Le séjour de Breton au centre neuropsychiatrique de Saint-Dizier et la lecture de plusieurs ouvrages en psychiatrie feront que la rencontre du poète avec Nadja a été perçue avec des yeux de scrutateur de l’esprit dans l’espoir d’y trouver une nouvelle forme de création poétique bien plus qu’un corps ayant besoin d’absorber des médicaments en vue de redevenir “normal”.